Au cercle des poètes non disparus

Au cercle des poètes non disparus !
 
 
 
 
Te souviens-tu de ces jours
où le coeur en feu
si souvent amoureux
nous franchissions anxieuses,
la tête encore toute embuée de rêves
trottinant en cohortes espiègles,
le seuil de cette lourde porte
menant vers son sublime sérail
le parc et son silence aérien
que les vêpres perçaient
d’inoubliables sons grégoriens.
Une fois de pied en cap
nos silhouettes finement inspectées
notre récompense tenait
dans ce bout de mie tendre
où s’étiraient comme invicibles
en joli pont rustique 
sur fond de paysage velouté
quelques carrés de vrai chocolat
que nos vraies dents de louves
aimaient tant à faire craquer.
Le décor ne se séparait jamais
de son gilet de cire
c’était obligatoire
comme sur nos blouses de coton bleu
chaque bouton maintenu emprisonné.
Un piano se tenait dans une pièce
j’y jouais souvent de deux doigts
un peu de mes rires
et beaucoup de mes émois
faisant tendrement sourire
mais jamais frémir
un Chopin malgré tout heureux .
Après les suées froides de l’étude
et l’inquiétude du lendemain,
un tapageur son de cloche
retentissait déjà dans le réfectoire
mettant un terme à notre prière
et annonçant le repas du soir.
Ne régnait alors
que le cliquetis feutré des couverts
batifolant en rêve
par-delà les portions de nos assiettes
au rythme de nos appétits démesurés.
Les samedis après-midi
j’avais cours de latin
et j’adorais voir le soleil filtrer
sur l’univers de Cicéron
me chuchotant par la fenêtre
« Carpe diem, carpe diem » !
Le printemps apportait toujours
son flot d’idylles passagères,
en bouquets de mots doux  éparpillés
dans nos sacs en bandoulière
ou vers l’effluve sucrée d’un parfum
sur un foulard sciemment oublié.
L’hiver quant à lui
ne faisait que s’amuser
de nos glissades effrenées
sur cet interminable boulevard
où nous marchions souvent en retard
du pensionnat au lycée.
Et les mercredis après-midi
nous revenions les bottes toutes crottées
les mains fleurant bon
la crinière des chevaux.
Un rien nous révoltait
l’émigré bafoué
le mendiant esseulé …
Alors on l’écrivait ou le clamait
dans le plus ardent des exposés,
afin d’éveiller toutes les consciences,
et ce fut cela notre adolescence
cet éclat de candeur
et de franche humanité !
 
Dis-moi mon amie
je ne crois pas qu’aujourd’hui
et malgré le fil des années
nos âmes se soient apaisées
ou nos coeurs trop taris.
Et qu’il est si bon de constater
que tout en nous depuis,
tel le plus beau des jardins
savamment préservé,
s’est intimement enraciné
et que rien,
strictement rien…
n’y a péri !
 
A Annick,
à nos plus belles années
et nos presque « 40 ans » d’Amitié  !
 
Arc-en-ciel  Rose rouge  Arc-en-ciel 

6 réflexions sur « Au cercle des poètes non disparus »

  1. EvaJoe Des mots – 18 Mai Sublime et grandiose, quel bel hommage à ton amie de 40ans, c’est grandiose et décrit avec des mots enchanteurs.

    Bisous petite sœur des mots

    EvaJoe

    J’aime

  2. Je suis revenue sur ce beau texte que j’aime beaucoup, j’y ai lu et vu autres choses que l’autre fois, là je m’attarde sur ta vie de pensionnaire et sur tes études. C’est bien dit et je t’imagine
    vraiment.

    Je continuerai ma lecture au fil ds jours et tant que tu n’auras rien mis de nouveau.

    Bisous, bonne journée de ta grande soeur des mots

    J’aime

  3. Petit coucou suite à la réception de ton mail …

    Une immersion dans ton nouvel univers musical et bucolique très agréables pour découvrir ton hommage à l’amie et aux liens tissés pendant ces tranches de vie inoubliables … ce texte a réveillé
    l’écho de souvenirs analogues … quel beau partage Sabine, je reviendrai te lire, respirer les parfums et prêter l’oreille à la mélodie de ces années précieuses pour aller plus loin dans le
    partage des émotions profondément enracinées .

    Je t’embrasse, Plume.

    J’aime

  4. Que d’émotions en te lisant…

    Une petite larme d’ado a coulé sur ma main,
    Ce temps de rires et d’incertitude
    est bien enfoui dans les plis du coeur…

    Une larme sur ce temps,
    sur ces rêves,
    sur ces échecs,
    ces réussites aussi…

    Une larme sur tous ces visages oubliés
    Qui reviennent en farandole
    me dire en souriant
    des murmures d’hier…

    Une larme sur les hasards de la vie
    qui donnent sens à la rencontre,
    qui créent des liens,
    des mots coquillages,
    sur des sables mouillés de souvenirs…

    Une larme, petite goutte de rosée,
    aux éclats d’espérance,
    qui nous ouvre des sentiers inconnus
    pour vivre demain…

    Une larme, petite goutte d’eau
    pour un merci de soleil et d’étoiles
    en pétales de fleurs!

    J’aime

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