Amie des étoiles et du vent ……..

 

Pour les croqueurs de mots, il fallait raconter un vêtement aimé, niché bien  au chaud dans notre malle à doudous, porté en boucle telle une mélodie enchanteresse,  ou désespérément perdu …

Avec des mots que j’aime simples, je vais donc vous conter l’histoire d’une « casquette saharienne »,  illustrée de quelques photos, ne sachant croquer les mots sans en déguster l’image ……….!

 

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Elle partagea mes escapades les plus douces, les plus givrées et les plus exaltantes,  courut avec moi sur mes pavés glissants du Nord,  traversa la Saintonge de part en part, respira les volcans, me protégea de la grêle, des ardeurs de la Meseta et devint au fil de mes cadences, réglées sur l’infini ……

« mon amie des étoiles et du vent » !

 

saharienne

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Gravée des lettres « SUD OUEST », s’il vous plaît, elle fut le reporter de tous mes états d’âme et de corps ……..

Comme elle il en existe pas ou peu, du moins je n’en ai pas encore trouvé, aussi blanche et légère que l’écume, avec cette adorable frimousse de saltimbanque.

 

Tout en elle transpirait le voyage, jusqu’à …notre rencontre !

Je l’avais en effet gagnée à la sueur de mes foulées, lors de mon premier marathon.

C’était une époque folle où je courais dans mon « plat pays », avec quelques potes aussi fous, 50 à 70 km par semaine.

En courant, nous faisions des tas de projets, tous plus insensés les uns que les autres, et nous fixions des RV mémorables  …

 

 

Lasou

Pas mal non plus comme vêtement, non ?     

 

 

Et notre histoire également fut à inscrire dans les annales de l’extraordinaire.

Eh oui « fut » car, vous l’avez deviné, je l’ai perdue !

Mais toute disparition, comme toute histoire, a mystérieusement un sens …

 

C’est à Puente la Reina, en Navarre, sur le chemin de Compostelle espagnol, encore appelé « le Camino Francés », que nos destins se séparèrent.

 

Je l’avais prêtée à notre fille « Lola », sur sa demande empressée, depuis quelques étapes …

 

 

Saharienne 3

saharinne 2Saharienne 4

Sniff !

 

 

Et elle n’a pas fugué en chemin, comme on pourrait le supposer, car j’y veillais telle …une mère sur son petit !

 

Le lieu où je ne la revis plus a, lui aussi, un parfum « d’extraordinaire  » …

Au « Jakué », un gîte paradisiaque aux tons paille, abricot et chocolat, aux couloirs exhalant des senteurs de poivre, avec de jolis rideaux de canisse, on y rencontra « Johanna » .

Son regard était si concerné et profond, qu’il restait en nous jusqu’à la fin des temps !

 

Regard de Johanna

 

 

Elle attacha au bras de chacun trois petits bracelets de chance …

Trois noeuds pour trois voeux et …une sorte de chaos à l’intérieur !

 

 

Noeuds

 

 

Elle avait une façon bien à elle, Johanna, de prendre dans ses bras et de serrer fort …

Ce fut la première fois de ma vie que je sentis, à ce point, un coeur se fondre, physiquement, dans le mien !

 

Et elle resta là,  mon « amie des étoiles et du vent », sur un coin de comptoir, dans cet Eden pour pèlerins où tous les voeux se font et se défont …….

Je partis sans elle au petit jour, sans me rendre compte de son absence, aussi étonnant que cela puisse sembler, comme si …son sort fut de rester là !

 

Ce n’est que bien plus loin que je réalisai …

Et les événements se précisèrent avec une évidence naturelle. Je revis le moment où nous étions arrivés, harassés par la chaleur, posant nos affaires sur le comptoir  en vainqueurs, comme on lève les bras à l’arrivée d’une course.

La toute première préoccupation d’un pèlerin, après la douche et le verre de bière bien fraîche,  est alors de faire tamponner sa crédencial, chose que nous fîmes aussitôt sur le même comptoir de bungalow …

Et puis et puis ….

une poignée d’étoiles et un souffle de vent sont restés là,  généreusement endormis …!

 

Lola était repartie toute heureuse, ce matin-là, tenant à la main la calebasse des pèlerins d’autrefois, la vraie,  qu’elle rêvait de trouver depuis toujours.

Et le chemin lui avait fait ce cadeau, la veille, à Obanos, juste avant d’arriver au Jakué.

La calebasse avait été laissée sur les lieux la nuit précédente, lors de la fête médiévale, par un baladin ; c’est ce qui nous fut raconté par l’ épicière,  soucieuse de  rassurer Lola qui craignait tant de commettre un vol !

 

Lola avait ainsi trouvé sa calebasse alors que moi je perdais ma vieille copine de route …La vie n’était-elle pas des plus espièglement imprévisibles ?

 

 

Calebasse

 

 

Et, le lendemain, c’est dans ce gîte, à Estella, que je me mis à méditer sur celle, au voile si doux, qui partagea tant de mes errances  …

 

Estella

 

 

J’étais allongée sur mon lit, sans pouvoir m’empêcher d’exprimer toute ma désolation , quand j’entendis cette bonne voix à l’accent farouchement suisse, qui me mettait en joie et à la fois m’apaisait, me consolait de tout !

C’était la voix  notre « petit suisse à la vanille » (à gauche sur la photo),  surnommé ainsi par Lola qu’il avait lui-même baptisée « ma charentaise » …

Merveilleux « Petit suisse » , amoureux du chemin de son état !

 

Petit suisse 1

 

Venu de Suisse à pied, avec sa carriole nommée « Zélinette »

 

Petit suisse 2

Deux enfants riant dans la brume !

 

 

 

La voix de cet « épris d’étoiles et de vent » me dit alors ceci, de son air délicieusement moqueur :

« Sur le chemin, il faut apprendre le détachement ! »

 

Et, combien je savais qu’il avait raison !

Nous avons bien trop tendance à nous approprier les êtres et les choses, les droits, les libertés, en oubliant que rien ne nous appartient sur cette terre, que tout est privilège et que nous nous devons d’honorer toute offrande comme la plus noble des valeurs et dans le plus digne des respects …

Mais je m’éloigne légèrement, quoique !

 

Tout se perd  pour se regagner un jour, ailleurs, sur d’autres voies et entre d’autres mains …

Et, s’il est une chose sûre, c’est que rien, jamais, n’arrive par hasard !

 

J’ose espérer que là où elle est, ma chipie de casquette vit une foule d’aventures et couvre de bien-être la tête d’un autre humain …!

Ou, comble de la magie terrestre, elle aura peut-être fait exaucer l’un des trois voeux d’un pèlerin, sous l’oeil attendri de Johanna…Ce genre d’étrange coïncidence arrive si fréquemment sur le chemin !

Quant à moi, je l’aurai gardée quinze ans …

 

 

Le vêtement dont on ne se sépare jamais n’était-ce pas, quelque part, un carré de tendresse furtivement découpé dans la fibre du temps  ?

 

 

IMGP3923 (Copier)

 

 

 

33 réflexions sur « Amie des étoiles et du vent …….. »

  1. Le destin a fait que ta casquette a été laissée dans un lieu que tu appréciais et comme il n’y a pas de hasard ! Elle est une sorte de « témoin », comme dans ta course à pied et tu l’as passée à quelqu’un d’autre pour qu’elle vive de nouvelles aventures. Sans doute, quinze ans, ça suffisait ! (rires).
    Merci pour ce très joli texte et qu’est-ce qu’elle est belle, Lola !
    Gros bisous.

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  2. bonjour !
    l’histoire d’une pauvre casquette abandonnee !!!15 ans de vie commune , de beaux moments !! je ne suis pas sur qu’il y a beaucoup de casquettes qui ont cette chance !!!!
    on te lirait pendant des heures !! merci
    bonne journee ma charentaise !

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    1. Très bonne journée à toi aussi, Myriam, et j’en profite pour te souhaiter tout ce qu’il y a de meilleur pour cette année 2015 (n’ayant pu le faire sur ton espace) …
      Amour, paix, belles rencontres, doux partages, magie des innombrables petits instants…….Tout ce qui fait rayonner le coeur et la santé, avec ce pouvoir de le distribuer tout autour !

      GROS GROS BISOUS : sabine.

      Ah non, c’est « Lola » la charentaise, moi je suis Ch’ti et fière de l’être (RIRES)

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  3. Je me régale toujours autant à te lire quel que soit le sujet abordé. La casquette saharienne s’en est allée vers d’autres horizons mais tu en a magnifiquement évoqué l’histoire .
    Bon lundi
    Bisous

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  4. Ah ces « petits vêtements » qu’on oublie!!!!
    C’est sûr il faut apprendre le détachement mais…. plus facile qu’à faire.
    Je me rappelle qu’un pèlerin au petit matin, n’arrivait pas à partir du gîte, il cherchait, cherchait, cherchait toujours. Nous lui avons demandé ce qu’il pouvait chercher : un foulard rouge. Nous avons cherché avec lui, mais point de foulard rouge dans le gîte. Il partit fort triste, en laissant quelque chose d’important, voire de très important. Et puis en allant au séchoir, derrière le gîte, qu’est-ce qui traînait par terre au loin bien rouge ? Nous avons pris la voiture, en priant Saint Jacques de nous faire retrouver notre pèlerin, qui effectivement a pu récupérer son ECHARPE ! sa joie nous fut délicieuse.
    Par contre mon chapeau des chemins, lui fut oublié dans un restaurant à Arzua, mais lui personne ne me l’a rendu. J’en ai un autre mais …….
    C’est vrai c’est dur de perdre peut être des détails pour certains, mais pour nous…………….!!!!

    Bonne et heureuse Année. Beaucoup de Paix et de tolérance pour tous.

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  5. Merci de nous avoir conter la vie aventureuse de ta casquette qui prit un jour un chemin de traverse.
    Moi c’est un pull marin qui m’a accompagné sur le chemin et m’a quitté au parc de la Tête d’Or à Lyon. En chemin on apprend à se détacher et accepter un oubli.
    Belle journée amie des chemins
    Bisous

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  6. Ta casquette me fais pensé aux livres que l’on oublie sur un banc ou que l’on oublie volontairement……Elle voulait aller sur d’autres têtes, tu n’avais plus peut-être franchement besoin d’elle, qui sait? Une choses est sûr rien ne sert de *s’attacher* aux choses matérielles, qu’emporterons lors de notre dernier voyage????????????? pas grand choses et c’est très bien.
    Bisous beau récits en tous cas.

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  7. C’est difficile de perdre.. de se détacher des biens matériels..
    Ta casquette maligne à voulu te mettre à l’épreuve
    et, félicitations sans l’avoir oubliée
    tu nous as parlé d’elle de bien jolie manière !
    Merci chère Sabine.. tes mots sont à croquer..
    Je te souhaite une belle soirée
    et t’envoie …
    …de doux bisous

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  8. Une histoire comme tu sais si bien les conter !………………J’ai une histoire curieuse avec un jupon très beau ,avec des volants que j’avais achetée très cher à l’époque et dont je ne me lassais point, tous les étés ,il était là , virevoltant de blancheur sous mes jupes noires,et de plus en plus beau au fil des ans….et puis…il a disparu du tiroir où il dormait quand je ne le mettais pas …………….J’ai remué tout autour de moi dans l’appartement, désolée, triste ….car je doute qu’il réapparaisse un jour..hélas ! …Pourquoi ? Pourquoi cet envol ,cette fugue hors du temps ?……………………..Il y avait bien eu une pile de cadres disparus de l’armoire ,et revenus un jour, au même endroit ô stupeur !!!!
    Mais là….je doute….de revoir cette merveille de volants et de broderie….Ah!……Chère Sabine , dis, quel être invisible est venu me le prendre pour danser dans l’au-delà ?…..
    Je t’embrasse ( mon ordi fait des siennes, alors ,je fais vite ce soir …)

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  9. Bonsoir Sabine,
    En effet, nous ne sommes que des passants sur cette Terre, et rien ne nous appartient, hormis qui nous sommes. « Quittez tout, et vous trouverez tout. » est-il écrit dans L’Imitation de Jésus-Christ, un livre que tu connais sans doute. Les biens matériels ne sont que des prétextes pour nous faire avancer, et ta casquette, j’en suis certain, vit un beau destin !
    Gros bisous de nous deux
    Alain

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  10. Sabine la fabuleuse histoire de ta casquette m’a autant attristé qu’elle m’a réjoui….Etant chauve comme un oeuf j’ai une collection impressionnante de casquettes …..que je renouvelle régulièrement vu que je les sème à tout vent car je fréquente souvent des endroits ou Eole prend un malin plaisir à les transformer en frisbee. Ainsi en ai je semées un peu partout dans le monde qui ont du servir à rendre plus douillet le terrier de quelque lapin ou la cache d’un écureuil. Comme toi j’ai donc appris le renoncement et comme toi je me console à chaque fois de la perte de mon couvre chef en « embrassant » goulûment une belle blonde !

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  11. Nous avons aussi notre privilège: celui de lire tes belles histoires, fils d’or mêlés à fils d’argent, douceur et rencontres, mystères et odeur des foins, des bois, des marches, et d’une casquette vagabonde qui rend peut-être heureux, à l’heure actuelle, quelqu’un que tu ne connaîtras jamais.

    Merci pour cet exquis morceau de vie, chère Sabine, et pour ces photos qui évoquent si bien ton récit.

    Je t’embrasse fort,

    Lorraine

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  12. J’imagine un pèlerin harassé, fatigué arrivant au « Jakué « , il ne sent plus ses pieds, quand soudain il entend une petite voix lui dire:

    – Bonjour
    Le pèlerin se retourne et voit briller une casquette blanche faîte d’écume, elle vibre , rayonne intensément. Dans un premier temps il ne pense pas que c’est cette casquette qui l’a salué, mais il sait que sur le chemin il se passe parfois des choses que l’on ne peut expliqué; aussi se rapproche-t-il d’elle, la prend, la trouve fort belle, et comme ce matin il a perdu la sienne, demande de ci de là à qui elle appartient.
    – Ce sont trois pèlerins qui ce matin nous l’ont laissé, ils l’ont sûrement oublié, mais il marche à une journée de vous peut-être pourrez-vous les rencontrer au hasard de votre route. Munis d’une description de notre Sabine, ma pèlerine favorite (sourire), il prend ta jolie casquette et s’endort en rêvant d’une belle rencontre avec les pèlerins fous.

    Voilà à ce que j’ai pensé en lisant ton article..Certes c’est faux, mais qui sait….Tout est possible sur les chemins, si ce n’est à toi, cette casquette va vivre 15 ans de plus une autre aventure…

    J’aime ce carré de tendresse découpé dans la fibre du temps…Des mots forts et évocateurs, sublime Sabine!

    Belle journée, j’espère que tu n’as pas top de vent.Je t’embrasse

    EvaJoe

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  13. Bonjour Sabine,

    J’aime tes histoires toujours remplies d’amitiés chaleureuses et, si je dois conclure comme toi sur le vêtement dont je n’ai pas envie de me séparer, c’est celui qui , usé, me raconte dans ses fibres les plus beaux moments de chaleur humaine que j’ai vécus.
    Merci pour ton histoire plein de tendresse
    Je t’embrasse chaleureusement

    Blanche

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  14. Je te comprends Sabine , on s’attache à certaines choses mais on ne sait pas pourquoi…
    J’ai aimé l’aventure de ta casquette …
    J’ai toujours sur moi, un carnet spirale où je note des rimes , des sensations et je m’en sers après pour écrire..
    j’y dessine aussi… un jour en marchant sur la plage, je l’ai perdu….
    J’ai refait le chemin inverse une foule de fois, impossible de le retrouver… j’ai même écrit un poème sur cette douleur..
    6 mois après, j’ai reçu une note de la main du Maire de cette Station balnéaire me disant de passer le voir …
    Je l’ai rencontré et il m’a remis mon carnet…. il a même lu plusieurs de mes poèmes…(le maire est une dame …)
    Douce journée Sabine
    Bisous
    timilo

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  15. Très joli billet ma chère Sabine… merci une fois encore pour ta manière d’évoquer et dire les choses… chaleureusement…. une séparation est toujours si douloureuse… un doux dimanche, où que tu sois.
    Je t’embrasse d’ici.
    Den

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  16. Bonjour Sabine,

    Tout ce que tu as pu raconter avec une casquette! C’est super!Et toujours, cette humanité, cette tendresse en filigrane. Ce que c’est agréable de te suivre sur ces routes-là
    Merci sabine
    Bises de douce journée
    😉

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  17. Me voici enfin à croiser ton chemin, tu dois m’en vouloir combien de fois je t’ai promis…mais voilà je pensais que d’ici je pouvais rester connectée jusqu’à pas d’heures hé »lasse », peut-être un coup du sort, la connexion est si aléatoire qu’il arrive que je ne puisse pas me connecter de la journée.
    J’ai cru reconnaître cette casquette mais celle que tu portais cet été était bien plus usée et ne portait aucune inscription. Par contre j’ai reconnu Lola qui a gardé son petit air mutin. Merci pour ce merveilleux partage, je ne regrette pas le détour.
    Je suis toujours dans ma retraite, j’apprécie cette solitude, pour le moment je n’ai pas grande envie de rentrer c’en est presque inquiétant !!!
    Bisous ma belle d’âme.
    Dômi.

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  18. Finalement c’est bête mais nous nous attachons eux objets surtout quand ceux-ci ont vécu nos aventures, je comprends bien ta tristesse, elle a décidé de rester dans ce lieu magique, comme tu dis pour y vivre de nouvelles aventures…rien ne peut la remplacer.

    Je possède également une vieille casquette, que j’avais toujours sur moi pendant les vacances, aujourd’hui elle est démodée, ou alors c’est moi que ne suit plus dans le coup lol cela dit je l’ai toujours, et quand je tombe dessus (oui cela arrive bien qu’elle soit dans un placard) j’aime me remémorer ce que nous avons fait ensemble.

    Tu es une grande sportive 🙂

    Bisous

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  19. Bonjour ch§re Sabine
    ton amitié fait chaud au coeur….merci….merci
    très bien écrite ton histoire..émouvante
    Je te souhaite un très bon lundi
    Nos amitiés bises
    Qing&René

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